Calcul de base

troll-imadeWEB-1Ónytjungur : Admettons que tous les participants à la production de biens travaillent contre rémunération ; on doit bien en conclure que le coût du travail augmenterait avec chaque nouveau participant ?

Tilvera : Eh bien, il suffit de savoir compter pour…

Ónytjungur : Admettons encore que toutes les entreprises calculent de manière à réaliser un profit ; dans ce cas, chaque nouvelle entreprise à but lucratif ajoute à ses coûts de production ses frais généraux et sa marge bénéficiaire.

Tilvera : Affirmer autre chose serait…

Ónytjungur : Alors je te prie de m’expliquer comment il se peut qu’un service que j’ai obtenu gratuitement soit plus cher que le même service qu’une entreprise à but lucratif me facture sur la base de ses frais généraux et de sa marge bénéficiaire.

Tilvera : Seul un benêt connaissant mal les opérations de calcul de base pourrait accepter une telle absurdité.

Ónytjungur : Ce qui augurerait mal des connaissances en calcul de base dans le pays d’où je viens. À une époque, un prestataire de service aidait gratuitement les chercheurs d’emploi à trouver un nouveau poste, car ceux-ci étaient, par le biais d’une ponction sur leur revenu, les employeurs du prestataire. J’ai constaté qu’aujourd’hui, ce service est assuré par 6671 entreprises à but lucratif qui en retirent un chiffre d’affaires annuel de 19,1 millions d’euros en vendant leurs 856195 biens, qu’elles-mêmes ont obtenus gratuitement. Si mes calculs sont bons, ceci n’entraîne-t-il pas une augmentation du coût annuel du travail, puisqu’il faut y ajouter les frais généraux et la marge bénéficiaire de ces 6671 nouveaux prestataires ?

Tilvera : Eh bien, il est clair qu’une fois dans ta vie, tu as rencontré un professeur capable de t’enseigner ce que les gens attendent en général du calcul. Mais tu sais sans doute également qu’une règle n’énonce que le fait qu’il existe des exceptions. La question qui se pose serait donc avant tout celle de cette attente, le calcul n’a rien à voir là-dedans.

Ónytjungur : Ce qui expliquerait que là-bas, une seule et même personne  a pu affirmer que 571 n’était pas supérieur ou inférieur à 844, mais égal, sans être contredit.

Tilvera : Maintenant, tu exagères.

Ónytjungur : Aucunement. Là-bas, ils expliquent qu’ils ne prélèvent aucune contribution sur les besoins vitaux de l’être humain, c’est-à-dire sur les choses dont l’homme a absolument besoin pour pouvoir survivre physiquement selon les lois de la nature. Et ils ajoutent qu’ils assureront la satisfaction de ces besoins vitaux pour les personnes incapables de le faire par elles-mêmes.

Tilvera : Ce qui fait sens. C’est bien là une condition de base pour une communauté : sans cela elle n’en serait pas une. Par ailleurs – si les choses n’étaient pas comme tu les décris – se poserait aussi la question de ce qui pourrait justifier la prétention à prélever une part de tout revenu dépassant le minimum vital, si en contrepartie on ne couvrait pas les besoins vitaux de ceux qui ne sont pas en état de le faire eux-mêmes, pour quelque raison que ce soit. Il ne s’agit bien que de couvrir les besoins vitaux, et rien de plus.

Ónytjungur : C’est bien cela.  Mais alors comment est-il possible qu’une seule et même personne, dans un même instant, doive accorder à une personne incapable de couvrir elle-même ses besoins vitaux une somme d’au moins 844€, car les faits l’y contraignent, étant donné qu’avec moins, cette personne ne serait pas en mesure de se nourrir à sa faim et de s’abriter dans une petite chambre, tandis qu’au même endroit, à celui qui est capable de subvenir lui-même à ses besoins et au-delà, on n’accorde qu’une somme maximale de 571€ ?

Tilvera : Parce qu’en matière de théories, les gens ne se laissent pas troubler par les faits ?

Ónytjungur : Ce qui expliquerait que là-bas, les besoins vitaux aient été divisés en 150 types de prestations qui sont ensuite distribuées par 40 administrations différentes.

Tilvera : Laisse-moi deviner : les différentes prestations doivent être rassemblées et décomptées dans un système de contrôle et de calcul complexe de manière à ce que le résultat final soit toujours le même chiffre, et ce quel que soit le nombre de prestations et les administrations à l’origine des versements.

Ónytjungur : Là-bas, une personne démunie sur quatre doit attendre des prestations prioritaires qui ne sont pas versées à temps.

Tilvera : Ce qui voudrait dire que le système n’empêche pas seulement la pauvreté, mais qu’il la produit aussi.

Ónytjungur : Abandonner la capacité à calculer et confier cette tâche aux ordinateurs s’est révélé une grave erreur.

Tilvera : Mais les ordinateurs calculent plus vite.

Ónytjungur : Alors il est vraiment surprenant que depuis lors, salaires et appointements n’y soient versés au plus tôt que le 12 du mois suivant. Quand j’avais douze ans et que je calculais moi-même chaque samedi le salaire hebdomadaire des ouvriers du bâtiment, en notant au stylo-bille salaire brut, taxes, charges sociales, salaire net, etc. sur les fiches de paie pendant que le patron allait chercher l’argent liquide à la banque, tous les décomptes de salaire étaient prêts chaque samedi avant midi pour que la secrétaire puisse répartir l’argent et les fiches de paie dans les enveloppes avant que les premiers ouvriers se rassemblent en file devant le bureau. Peux-tu t’imaginer ce qui serait arrivé si les salaires n’avaient été virés sur un compte que le 12 du mois suivant, parce qu’il m’aurait fallu tout ce temps pour calculer les salaires ? Et n’oublie pas qu’à l’époque, ces ouvriers pouvaient encore puiser dans leur épargne pour patienter jusque-là.

Traduction: Cyrille Flamant

deGrundrechnen

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